L’étiquetage concernant la qualité des normes nutritionnelles « Nutriscore » deviendra-t-il obligatoire sur les bouteilles de vin ? Si l’on doit se référer strictement à ce système de notation, le sang de la terre, le fameux produit de la vigne devrait en prendre pour son grade : un réajustement s’impose. Là où l’actuel nutriscore ne compte que 5 échelons avec des dégradés de couleur sémiologiquement proches d’un feu de signalisation, le « rouge » de la lettre « E » (dernière notation) ne suffisant pas, l’entrée du vin dans ce format d’étiquetage visuel invoque donc un ajout colorimétrique qui laisse perplexe : le noir absolu, qui n’est scientifiquement pas une couleur et qui précise l’absence de lumière.
Le comble de l’ingratitude ne se situe pas dans le rejet soudain d’un produit qui a accompagné l’humanité dans ses hauts et ses bas : Noé plantant la première vigne pour oublier l’anéantissement de l’espèce humaine, c’est faire du mythe fondateur une bonne occasion de se soûler. Non, on est ingrat quand on peut croire que « profiter de la vie », de temps à autres, c’est s’interdire quelques années supplémentaires d’une existence de grabataire au fond d’un hospice pour malheureux, avec au mieux, de l’eau du robinet pour trinquer les morts de la veille, au pire, une piquette de supermarché à fêter l’an nouveau. C’est d’abord être ingrat envers soi-même que de refuser d’égayer la chair et l’âme quand l’occasion est trop belle pour se permettre de la refuser ; après il faut bien éduquer ceux qui ne savent pas boire ou mieux : interdire le vin mauvais urbi et orbi, ce qui empêcherait scientifiquement de nuire gravement à la santé.
