Si le vin français est toujours considéré comme l’un des meilleurs au monde, c’est principalement grâce à l’étranger qui en perpétue toute la sainte liturgie œnologique. On raconte que les Chiliens, les Sud-Africains, les Australiens, les Californiens et même les Chinois et bientôt les Suédois fabriquent un vin d’aussi bonne (voire parfois — selon l’avis de certains — de bien meilleure) qualité.
C’est que le vin français est lourdement chargé d’une longue et riche identité culturelle difficile à transcender. On ne verra jamais, sauf dans un nanar fauché, un acteur hollywoodien se verser un verre de gros rouge qui tache, voire siroter une canette de bière lorsque le casting lui demande de passer pour une personne raffinée. Un gros plan d’une bouteille et son étiquette flanquée de belles lettres « classic script » au nom rappelant un titre de noblesse française, la silhouette au fusain d’un château même en ruine suffiront à annoncer le prestige et la grande classe du propriétaire gourmet et toujours cultivé, parfois également criminel et cannibale. Que cette symbolique soit perpétuée durant quelques années encore par des consommateurs aux quatre bouts du monde est une bonne chose. N’attendons rien des propriétaires légitimes des lieux, ils sont trop occupés à singer les autres, casquettes de Baseball vissées sur le chef et un demi canette alu dans la main. Le consommateur français, en snobant la boisson qui perpétue ses titres de noblesse perdus, scie l’une des dernières branches encore saines où s’est nichée l’exception culturelle française
D’ici à ce qu’Halloween ait remplacé Carnaval, on aura le temps de se préparer des déguisements plus vrais que nature avant de jouer les pendus… Et n’allons pas invoquer quelque malédiction envers les Anglo-Saxons : ils n’ont jamais souhaité contempler la tour Eiffel ou piétiner le long pavé des champs élyséens et se coltiner la vue affreuse de beaufs canada-dry, qui ressemblent à des redneck de près, mais qui baragouinent l’anglais plus mal que de vrais Mexicains : Las Vegas possède déjà tout cela ; et certaines machines à plumer les touristes n’ont pas juste la vocation de vous délester de généreux pourboires, elles peuvent parfois vous rendre la monnaie avec une générosité plus franche que le faux sourire en biais d’un serveur parisien.
https://www.vitisphere.com/actualite-91712-Les-Francais-nont-jamais-aussi-peu-bu-de-vin.htm
https://www.bbc.com/news/magazine-21929287
https://www.winespectator.com/articles/young-france-isnt-drinking-wine-4162
https://www.thelocal.fr/20190214/french-drink-less-and-less-wine-as-americans-consume-more